Il fête ses 90 ans aujourd’hui, Brian Robinson fut le premier coureur pro anglais à finir le tour de France (en 1955) et le premier à gagner des étapes sur la Grande Boucle (1958 et 1959). Il remporta aussi le critérium du Dauphiné Libéré, le GP de Nice, 8ème sur la Vuelta 56, 14 ème du Tour de France la même année entre autre.
Désormais président d’honneur de la célèbre fondation « The Dave Rayner Fund« , cette fondation qui aide financièrement les jeunes espoirs Britanniques dans les clubs amateurs ou continentaux afin de réaliser leurs rêves.
« Robbo » son surnom, est toujours membre du Huddersfield Road Club, fidèle à son premier club depuis plus de 70 ans, il aide toujours le cyclo-cross local (sa véritable passion) mais il utilise dorénavant un vélo à assistance électrique pour lui permettre de suivre ses copains sur les collines du Yorkshire.
Il fut l’inspiration d’autres champions britanniques comme Tom Simpson ou Barry Hoban (Uncle Barry), un autre Yorkshireman, qui a remporté huit victoires d’étape sur le Tour . entre 1967 et 1975 et deux étapes sur la Vuelta
Dans une interview accordée au journal « The Guardian » il y a quelques années, Brian Robinson se souvient des années « 50 », quand lui aussi était ce jeune coureur venu tenter sa chance en France. A l’époque, l’argent se faisait rare au Royaume Uni et le gars du Yorkshire se souvient de ces navets qui ont souvent constitué son plat principal au début de sa carrière.
Brian Robinson (Au Guardian) « Je suis monté sur un vélo quand j’avais 13 ans, nous étions alors en guerre. Il n’y avait pas de voitures ni de bus à l’époque. Si vous vouliez aller quelque part, il fallait prendre son vélo pour tout, comme pour visiter le reste de notre famille habitant à 40 kilomètres plus loin.
Au début de ma carrière, ce furent des années difficiles. On vivait de contrats ici et là. On gagnait 50 £ par apparition, la prime était négligeable car ils avaient tout dépensé pour obtenir les coureurs sur les courses. Vous aviez alors la possibilité d’obtenir soit des primes en espèces pour avoir quelque chose dans votre poche ou d’essayer d’obtenir un podium pour augmenter la valeur de votre contrat. S’il n’y avait pas de sous dans ma poche, je mangeais des navets. Je l’ai fait plusieurs fois. Je ne peux pas penser comment je l’ai fait ou pourquoi je l’ai fait. J’étais libre c’est tout, je n’avais aucun lien familial. Et après avoir vendu ma voiture pour payer mes dépenses, il n’a pas eu d’autre choix que de m’en aller. »
Les souvenirs du tour de France
« Ce dont je me souviens, c’est la chaleur et le bruit. On en bavait lors des ascension et les gens vous encouragez » allez, allez, allez « et votre tête faisait « boum, boum ». Le bruit était impressionnant. Les courses au Royaume-Uni étaient plus discrètes , il n’y avait pas la foule mais le bruit et la fête se prolongeaient dans la nuit. La Grande-Bretagne n’était pas une équipe de premier plan donc vous restiez peut-être comme un « fleapit » (miteux) de quartier mais la fête durait jusqu’à 2 heures du matin. Et les collines étaient énormes, vous vous approchiez d’un col, leviez les yeux et voyiez les pare-brise briller au-dessus de vous. »
Tom Simpson
L’un des coéquipiers de Robinson était le jeune Tom Simpson, qui a suivi le Yorkshireman en France et qui a signé son premier contrat professionnel avec son ainé. Robinson se souvient avec ironie que le salaire initial de Tommy était bien supérieur à ce qu’il gagnait lui-même en tant que professionnel chevronné.
» Robbo » se souvient de Tom Simpson comme «ayant énormément de panache et il pouvait participer à des courses d’un jour ainsi qu’à des Tours. Il était en fait meilleur sur les courses d’un jour qu’il ne l’était sur le Tour. Il y avait le côté amusant de lui ainsi que son ambition brûlante. Il voulait être le meilleur coureur de tous les temps, il ne pensait qu’à ça »
le Tour maintenant, cela ressemble plus à un cirque qu’à une course de vélo.
Le cyclisme moderne, qu’en pense t-il?
Brian Robinson n’aurait peut être pas trouvé sa place dans le cyclisme moderne. Ce qui lui plaisait, c’était le côté décontracté et nomade de cette vie
« C’est un business, alors qu’autrefois c’était un hobby. Quand je participais au Tour, il n’y avait besoin que de 1800 lits pour toutes les équipes. Maintenant, il en faut 5000. A l’époque, on n’avait qu’une paire de chaussures et un maillot pour quinze joursQuand je vais sur le Tour maintenant, cela ressemble plus à un cirque qu’à une course de vélo.
De mon temps, à la signature des équipes, vous vous asseyiez sur les marches de la mairie et les gens pouvaient vous parler. Désormais, vous ne pouvez pas entrer sans une accréditation autour du cou. C’est gigantesque. Le tour va se dévorer lui même
Les coureurs des années 2020
« Je ne suis pas sûr qu’ils apprécient le cyclisme autant que nous. Nous roulerions sauvagement les uns contre les autres, puis partagerions ensemble le voyage du retour. On jouait aux cartes dans le train de retour à Paris après Paris-Nice. Je n’aimerais pas courir aujourd’hui. Je suis un personnage qui marche à l’instinct, j’improvise tout le temps et cela dans n’importe quelle situation. En gros, j’ai apprécié ma vie de coureur parce que j’ai fait ce que je voulais être. C’était une belle vie et personne ne l’avait fait avant moi auparavant. »