Annoncé comme « Fake news » par le président de l’UCI, le Breton David Lappartient, le mouvement de protestation des coureurs contre l’UCI et le syndicat actuel, le CPA, est bien réel. Cette « grogne » se traduit désormais et officiellement par la création d’un nouveau syndicat : « The Riders Union ».
Le site Cyclingnews a publié l’interview du président de ce nouveau syndicat qui n’est pas encore reconnu par l’UCI.
This morning, before informing the press, we informed other stakeholders, @UCI_cycling and @cpacycling of our initiative. We commit to constructive and fruitful discussion with all of them. #onerideronevote
— TheRidersUnion (@TheRidersUnion) November 2, 2020
Lors d’une conférence de presse numérique réunissant une dizaine de journalistes influents du cyclisme, « The Riders Union » a donc été lancé officiellement hier. Il est le résultat du mécontentement de nombreux coureurs, chefs d’entreprises et représentant du monde du cyclisme contre le système actuel. Il devient donc le 2ème syndicat des coureurs pros avec le CPA chez les hommes.
« UN COUREUR, UNE VOIX »
Le concept est assez simple: « Un coureur, une voix ». L’idée de The Riders Union est née à la suite de plaintes de coureurs contre le syndicat CPA accusé d’être une marionnette pour l’UCI et de ne pas défendre correctement les droits des coureurs.
Le CPA fait l’objet de critiques concernant sa structure et son système d’élection interne qui repose sur des blocs d’associations nationales (la France est très influente au sein du CPA, tout comme l’Italie et l’Espagne, les 3 pays composant la majorité des votes). Les coureurs ont donc demandé la mise en place de nouveaux protocoles comme « un coureur, une voix ». Avec Riders Union, tous pourront voter et se faire entendre.
Le CPA avait pourtant promis aux coureurs de réformer l’organisation il y a 2 ans mais force est de constater que les réformes promises n’ont pas convaincues ces derniers.
Naissance de l’idée d’un autre syndicat
Le fond de solidarité des coureurs pros a servi à financer les avocats de l’UCI (sous l’aval du CPA) contre la société des équipes worldTour « VELON ».
Un grand nombre de professionnels se sont également énervés l’ivre dernier parce que le CPA a soutenu la proposition de l’Union cycliste internationale UCI de récolter pas moins d’un million d’euros auprès du Fond de solidarité WorldTour pour les frais de justice de l’organisation internationale contre la société Velon qui leurs intenter un procès.
Le syndicat CPA a agit contre l’avis de la majorité de ses adhérents les coureurs. Sous la direction de certains coureurs de la Jumbo-Visma, dont George Bennett, une coalition s’est alors fondée
C’est ainsi que Stef Clement et l’ancien directeur de l’AIGCP, Luuc Eisenga, sont entrés en scène pour former une coalition avec les coureurs pros et leurs agents pour fonder « The Riders Union ».
Ces dernies ont constaté que le CPA, financé aussi par deux pour cent de la masse salariale du WorldTour, ne représente pas leurs intérêts de manière optimale et que tout devait alors changer. Ce soutien est venu non seulement des Pays-Bas et de la Belgique mais aussi de nombreux pays anglo-saxons, la France, l’Italie et l’Espagne (pourtant fortement présent au sein du CPA).
Le nouveau syndicat est dirigé par Luuc Eisenga et l’ancien coureur de la Jumbo-Visma Stef Clement, qui occupe actuellement le poste de président par intérim. Le reste du conseil est composé de Michael Rutherford, Andrew McQuaid et Thibault Hofer.
Luuc Eisenga (48 ans) est un néerlandais qui a longtemps travaillé dans le cyclisme pro avec les équipes Motorola, Lotto jumbo Nl et il a été président de l’AIGCP (syndicat des équipes) entre autre avant de partir dans le monde du football professionnel. Il revient donc à ses premiers amours.
Basic principles of the union will be around better sustainability in the sport, financial stability for riders, increased (social) security and proactive collaboration with other stakeholders. #onerideronevote
— TheRidersUnion (@TheRidersUnion) November 2, 2020
Stef Clément à Cyclingnews: « J’ai écouté de nombreux cyclistes et parties prenantes (…) L’une des plaintes que j’ai entendues était que les coureurs n’étaient pas écoutés et qu’ils n’étaient entendus par personne. Pendant de nombreuses années, les coureurs ont eu ce sentiment, mais pour devenir membre de notre syndicat, il faut être proactif en vous inscrivant alors qu’avec le CPA vous êtes automatiquement membre. Oui, nous avons besoin d’un certain nombre de coureurs pour créer une base mais nous avons aussi besoin de coureurs actifs, ceux qui veulent vraiment faire un changement. »
Conséquences
Mi-juin, plus de 325 coureurs professionnels ont signé (en 48 heures) une pétition pour la réforme de l’actuel syndicat CPA. Chris Froome, quadruple vainqueur du Tour de France, est l’un de ceux qui ont porté l’idée de la réforme. Il a participé à une visioconférence aux côtés de Nicolas Roche, Robert Gesink, Matej Mohoric, Jasper Stuyven, Sam Bewley, Jos van Emden, Koen de Kort et Robbie Hunter.
Des agents de coureurs comme Dries Smets, Manuel Quinziato et Andrew McQuaid, ont également pris part à cette réunion.
Par la suite, ils ont demandé de discuter avec le CPA mais l’organisation n’a pas entendu leur appel donnant ainsi le coup décisif pour fonder The Riders Union.
Les principales priorités de « The Riders Union » sont:
Améliorer la durabilité du sport grâce à une meilleure sécurité lors des compétitions, une meilleure sécurité (sociale), une démocratie et une transparence totales au sein de l’Union et une coopération constructive avec les parties prenantes du sport.
Un conseil des coureurs et « un coureur, une voix »
L’union établira un conseil des coureurs, avec un représentant de chaque équipe et un conseil de surveillance de cinq membres. Tous les coureurs auront le même vote pondéré et influenceront directement sur toutes les décisions importantes.
« The Riders Union » sera t’il reconnu par l’UCI ?
Est ce que l’UCI va reconnaitre le statut ou la légitimité du nouveau syndicat? Comme c’est le cas de l’Alliance cycliste, qui a gagné en popularité en tant que syndicat dans le peloton féminin mais qui n’est toujours pas officiellement reconnue par l’UCI, Riders Union n’aura probablement pas de siège aux réunions du Conseil du cyclisme professionnel (PCC) qui déterminent l’orientation du sport cycliste mais ce n’est pas la priorité du nouveau syndicat à l’heure actuelle.
Luuc Eisenga (à Cyclingnews)« Je suis persuadé qu’une fois que le message sera passé et que les coureurs , qui verront que nous allons faire avancer les choses, nous rejoindront
Nous avons un bon groupe de coureurs avec nous déjà et ce qui nous a donné cette confiance, c’est la pétition que nous avons organisée il y a quelques mois, où nous avons eu 350 coureurs du peloton en quelques jours seulement. Nous avons parlé d’un coureur par vote pour avoir une influence directe sur les décisions finales. En fin de compte, ce sera aux coureurs de décider s’ils veulent nous rejoindre ou non. Nous pensons que nous avons suffisamment de points intéressants et d’aspects positifs.
Chaque athlète a la liberté de rejoindre le syndicat qu’il souhaite. Hier matin, je tendais déjà la main au CPA pour lui dire que nous allions nous lancer ce lundi et pour les tenir informés. Pour nous, il ne s’agit pas de se battre contre eux. Il s’agit de défendre les intérêts du sport et des coureurs professionnels.
Nous pourrions nous retrouver avec deux syndicats défendant les coureurs et c’est tout à fait normal dans la pratique. Il est temps d’avoir une association de coureurs proactive qui puisse défendre les intérêts des coureurs et travailler avec les autres acteurs du sport. Mais la reconnaissance avec l’UCI n’est pas la première étape, ce sera le résultat d’un travail ».