L’Irlande, ce pays peuplé de 4,9 millions d’habitants (et qui en compte 20 fois plus aux USA) est l’île des légendes, ce lieu des contes que l’on écoute le soir sur les comptoirs des pubs de la Verte Erin. Et parmi toutes ces légendes, ils en ont aussi dans le cyclisme comme Seamus « Shay » Elliot, le premier maillot jaune irlandais (en 1963) et équipier de Jacques Anquetil ou Jean Stablinski, le Grand Sean Kelly, Stephen Roche, puis Dan Matin, Nicolas Roche emmenant dans le sillage de leurs roues un tas de jeunes aux dents longues comme Sam Bennett, Eddie Dunbar et tant d’autres.Désormais, les jeunes irlandais veulent batailler à travers le monde, tous animés par ce « fighting Spirit » légendaire. Les équipes formatrices se sont alors multipliées à travers l’île pour les aider à atteindre leurs rêves de conquête et les courses ont fleuries dans les comtés, même au fin fond du Connemara comme dirait un chanteur français.
L’une d’entre elles s’est même inspirée de Paris Roubaix et du Tro Bro Léon. Située dans le nord ouest de l’Irlande, dans le comté de Galway, aux portes du célèbre Connemara… Son nom; « La Galway Classic Race« . Dans ce paysage incroyable, les coureurs empruntent les routes qui traversent les lacs et les sentiers de graviers et de boue. La première édition fut parrainé par une autre légende avec le « King » Sean Kelly, le Seigneur des lieux puisqu’il court désormais (pour le plaisir) sous les couleurs du Team Galway Cycling Club.Nous avons interrogé Cathal Dillane, l’organisateur de cette course de niveau amateur « élite »…Mais les hommes du Connemara sont toujours un peu fous et ils verraient bien cette classique de l’Enfer Irlandais devenir, un jour, une bonne bagarre entre pros.
Qu’est-ce que la Galway Classic Race ?
Chez nous, les ribines, on les nomment « Boreens »
Cathal Dillane
; « La Galway Classic est une classique pour les amateurs (irlandais et Britanniques) qui comprend plusieurs secteurs accidentées appelés « Boreens », ce que vous les cousins bretons nommez « Ribines »
Ces secteurs sont des pistes agricoles, généralement faites de gravier et de poussière, avec de l’herbe au milieu ! Nous utilisons également des routes qui traversent les « marais » locaux, qui sont des zones humides tourbeuses très caractéristiques de la campagne irlandaise, en particulier dans l’ouest du pays. Ces « tourbières » donnent à la course un véritable aspect « classique ».
On l’a lancé, sous le parrainage de Sean (Kelly)pour la première fois en 2019. Notre version 2020 aura lieu le 25 octobre prochain et tous attendent ce jour avec impatience »
Je me souviens de Kelly, Moser, Bondue, Duclos Lassalle, Madiot, Wojtinek, Plankaert, Ballerini serrant les dents en luttant contre les conditions et le parcours. Ils dansaient en Enfer ces gars là
Pourquoi l’avez vous créé?Cathal Dillane;
» Quand j’étais adolescent, je regardais Sean Kelly et d’autres comme lui courir des gars comme Moser, Bondue, Duclos Lassalle, Madiot, Wojtinek, Planckaert, Ballerini et tant d’autres sur Paris Roubaix, ils étaient des guerriers et j’aimais la dureté de la course. C’était fascinant de les voir se battre sur des pavés et dans la boue, sous la pluie et de les voir complètement couverts de la tête aux pieds par cette terre sorite de l’enfer ! J’admirais le courage et la dureté de ces gars, j’aimais les voir serrer les dents en luttant contre les conditions et le parcours. Ils dansaient en Enfer…. Il faut être fou pour aller à ce genre de bal et justement en Irlande, nous sommes aussi des fous. C’est cette ténacité et cette détermination qui m’ont amené à m’intéresser aux courses et particulièrement aux classiques.
Paris Roubaix reste ma course préférée. Je lis parfois des livres comme celui de Pascal Sergent : « Master of pavé, A history of Strongmen » . Ce livre, lisez le, c’est tout simplement incroyable… De plus, cette course a même une association, les Amis De Roubaix, qui s’occupe des pavés toute l’année tels des orfèvres, ils sont les gardiens du Temple . C’est bien plus qu’une course, c’est un état d’esprit. »
Vous avez donc créé votre classique en Irlande en mémoire à ces coureurs
Cathal Dillane; « Oui entre autre. Une classique est très différente d’une course normale ou d’une kermesse. Tout d’abord, le fait de courir sur un parcours continu par opposition à un style kermesse donne à la course une allure « épique ». Bien sûr, c’est une course plus difficile à organiser, mais elle est plus amusante et elle vit plus longtemps dans la mémoire des coureurs qui y participent.
Elle est épuisante et seuls survivent les plus forts ! C’est un exploit que de finir la course !
De plus, les courses avec les secteurs pavés ou de boue présentent des défis uniques : pour réussir, les coureurs doivent être concentrés et agressifs toute la journée et chaque secteur apporte une course dans la course. Il n’y a tout simplement nulle part où se cacher ! Elle est épuisante et seuls survivent les plus forts ! C’est un exploit que de finir la course ! Je voulais avoir une course dans le calendrier irlandais qui donne aux coureurs l’occasion de vivre ce type de course et j’ai donc créé le Galway Classic. »
Dans le conté de Galway, aux porte du ConnemaraCathal Dillane;
« Étant donné que nous sommes à la frontière de l’Europe, nous avons plus que notre part de pluie et de vent et cela rend la chose plus difficiles pour les coureurs. Vous avez un chanteur en France qui chante l’enfer du Connemara je crois ? Mike Sardou non? Il cite même le nom de Sean Kelly (rires)! La course se déroule à East Galway, juste à l’extérieur du Connemara, donc le terrain et les conditions météorologiques sont similaires, avec beaucoup de « trous » exposés où le vent et la pluie font des ravages ! Cela peut représenter un défi important pour les coureurs effectivement. »
Cette course va devenir un événement clé du calendrier Irlandais pour de nombreuses années à venir.
Combien de coureurs pour la 1ère édition en 2019? Aiment-ils ce genre de course ?
« La Galway Classic est un nouveau concept sur la scène des courses irlandaises et cette année, ce n’est que la deuxième édition, donc le nombre de participants a le temps d’augmenter. Cependant, elle a déjà connu un énorme succès et en 2019, nous avons été nommés « Événement de l’année » par les membres de Cycling Ireland (fédération Irlandaise de Cyclisme). Malgré le report de la course à cause du Covid, la demande de places pour l’événement de 2020 a été excellente ! Je pense que cette course va devenir un événement clé du calendrier Irlandais pour de nombreuses années à venir. »
En Bretagne, le Tro Bro Léon existe depuis 36 ans. La course de vos cousins bretons vous a-t-elle inspiré ?
« Oui, exactement. J’ai pensé à votre « druide » breton qui se nomme Jean Paul Mellouet. J’avais vu une de ses interviews sur la télé irlandaise il y a quelques années. Quand j’ai réfléchi au type de course que nous voulions faire, le Tro Bro Léon a été l’une des premières courses auxquelles j’ai pensé ! En Irlande, nous n’avons pas de pavés, mais nous avons beaucoup de pistes et de trous similaires à ceux utilisés pour le Tro Bro, dans le pays du Léon.
Même si ce n’est pas encore une course du World Tour, le Tro Bro Léon est à mon avis l’une des courses professionnelles sur route les plus passionnantes du calendrier UCI
Le Tro Bro Léon est l’une de nos références avec Paris Roubaix. Même si ce n’est pas encore une course du World Tour, le Tro Bro Léon est à mon avis l’une des courses professionnelles sur route les plus passionnantes du calendrier UCI. C’est une course fantastique, agressive et changeante du début à la fin, pleine de ténacité et de courage ! C’est un défi brutal et j’adore la regarder ! Et l’année dernière, nous avons eu une équipe irlandaise (EvoPro Racing) là aussi, ce qui était très agréable à voir. À bien des égards, la Galway Classic est très similaire au Tro Bro et en fait, j’espère qu’à l’avenir, nous verrons des équipes amateurs françaises participer à la Galway Classic. Qui sait, peut-être qu’un jour la Galway Classic deviendra une course professionnelle comme le Tro Bro ! »
Votre club se nomme le Galway Cycling Club. Le cyclisme attire-t-il beaucoup de jeunes en Irlande?
« Je fais partie d’un grand groupe de personnes qui s’occupent du Galway Bay Cycling Club. Je suis plus impliqué dans le côté course et oui il y a pas mal de coureurs, effectivement. Mais nous avons un comité très varié et très actif dont les membres travaillent constamment pour aider à développer et à nourrir la scène cycliste ici à Galway. Et la demande est très forte.
Mais le nombre de cyclistes » loisir », et en particulier chez les femmes , a considérablement augmenté ces derniers temps, ce qui est très bien. Le nombre de cyclistes ‘loisir’ ont même considérablement dépassé les coureurs cette année. »
Le Grand Sean Kelly est l’un de vos membres de votre club ? Vous donne-t-il des conseils sur la Galway Classic Race ?
« Oui, Sean vit dans la région, ici chez nous. Il est un membre actif de notre club, et il fait toujours beaucoup de vélo. Il est toujours présent sur les sorties et c’est formidable pour les membres de rouler aux côtés de quelqu’un qui a été le meilleur cycliste du monde !
Le fait d’avoir un type qui nous donne des conseils et qui a gagné 9 monuments cyclistes n’est pas une mauvaise chose ! »
Sean préfère montrer l’exemple plutôt que de donner des tas de conseils, et nous avons toujours la chance d’apprendre une chose ou deux de lui en le regardant sur la route ! Il nous a également beaucoup aidé à promouvoir notre course. Il est notre parrain et le fait d’avoir un type qui nous donne des conseils et qui a gagné 9 monuments cyclistes n’est pas une mauvaise chose ! »
Video de la promotion (2019) des courses de l’Enfer dont La Galway Classic Race par Sean Kelly
https://youtu.be/iLh0XNnUTfs