Il est australien mais Cadel Evans (vainqueur du Tour de France 2011) vit à la frontière italo-suisse, à Stabio, dans le canton du Tessin. Non loin de l’épicentre de la pandémie qui a profondément touché l’Italie à Bergame. Ce qu’il a vécu, ce qu’il a vu l’a profondément bouleversé. Après ça, pour le champion australien, le cyclisme n’est que secondaire. Il craint même que la saison 2020 soit une année totalement blanche tant il sera impossible de rassembler autant de nationalités venues des 4 coins du monde.Il s’est confié à SporzaCadel Evans (à Sporza):
« J’ai beaucoup d’amis et de connaissances en Lombardie et j’habite à quelques centaines de mètres de la frontière. C’est là un monde complètement différent, l’épicentre de l’épidémie européenne. Tout le monde est complètement enfermé, mais j’ai entendu dire que la semaine prochaine, les coureurs professionnels sont à nouveau autorisés à s’entraîner dehors après des semaines de confinement.
Ça, c’est dur
Lorsque le gouvernement italien a annoncé qu’il allait fermer les frontières, j’ai pris mon vélo pour me rendre à la frontière la plus proche, qui se trouve à environ 800 mètres de chez moi. Juste pour jeter un coup d’œil par curiosité. Ce qui m’a frappé, c’est que la dernière fermeture des frontières remonte à la Seconde Guerre mondiale ».
La seconde chose était la longue file de corbillards qui se rendait au cimetière de Bergame. Cela m’a bouleversé. Bergame est très proche et aussi un centre de cyclisme. De nombreux produits et vêtements que nous utilisons y sont fabriqués. Santini, la marque de vêtements qui fabrique le maillot de champion du monde, produit maintenant des masques buccaux. Ça, c’est dur. »
Pessimiste sur le cyclisme.
Cadel Evans; »Ce n’est pas si mal pour ma course (Cadel Evans Ocean Race). L’Australie n’a pas été si durement touchée par le covid et la prochaine édition ne sera pas avant janvier 2021. Mais le sport en général a un problème de base »
« L’âme du cyclisme et ce qui en fait un si grand sport est aussi ce qui rend possible la propagation du covid »
Cadel Evans:
« Une course, c’est beaucoup de gens, proches les uns des autres et venant des quatre coins du monde. Vous pouvez organiser une course sans public, mais il y a aussi un contact dans le peloton. Des corps en sueur, de la salive qui vole… pas les conditions les plus hygiéniques sur la voie publique ».
La logistique aussi est un cauchemar pour le cyclisme qui doit rassembler tout le monde, avec des frontières fermées et des restrictions de voyage, mais Cadel Evans pense que le capitalisme pourrait être le salut face à ce fléau.
Cadel Evans; « Après un certain temps, l’économie devrait se remettre sur les rails. Les gens ont besoin de manger. Les gouvernements doivent trouver un équilibre entre la santé et l’économie, et c’est pourquoi je pense que le Tour est aussi important pour le pays que pour le cyclisme. »
Il pense que de nombreuses équipes ne viendront pas
« J’espère que je me trompe et que c’est le pire des scénarios. Le cyclisme professionnel s’est développé au cours des 20 dernières années, passant de la Coupe du monde au Pro Tour pour arriver à ce qu’il est aujourd’hui : le World Tour avec 20 équipes. Une crise qui ferait reculer le sport de 30 à 40 ans dans le temps. Je ne veux pas y penser, mais on ne peut pas vraiment l’exclure, j’en ai peur ».