A 28 ans, Maxime Daniel a décidé d’arrêter sa vie de coureur professionnel et la compétition définitivement. Blessé (nerf crural coincé), il va ranger son bike au fond du hangar à la fin de l’année, l’accrocher sur ce clou des souvenirs . Il ne le sortira que quelques fois, histoire de s’offrir une bonne ballade entre potes et de se raconter quelques épiques batailles. 7 ans passés chez les pros, le Breton a fait le tour de la question et pris une décision mûrement réfléchie, avant le tour de Bretagne et après cette dernière blessure.
Car Maxime Daniel marche à la passion et rester pro pour n’être que pro ne l’intéressait pas. Ce fils d’agriculteurs a choisi ce métier pour vivre l’aventure de ce monde, vivre cette belle parenthèse dans sa vie de « terrien ». Il savait déjà, bien avant de commencer, que si cette passion fanerait il repartirait vers celle qu’il aime depuis sa tendre enfance : la terre.
Vainqueur pourtant sur le Tour de la Communauté de Madrid cette saison, il ne peut plus se sacrifier pour ce métier exigeant et souvent bien ingrat. Il aurait peut être pu continuer chez les Bretons de Vital Concept B&B Hotels la saison prochaine, mais la flamme s’essoufflait et Maxime Daniel n’est pas le genre de bonhomme à rouler simplement pour la fiche de paye à la fin du mois. Si la passion s’estompe, autant quitter tranquillement la table de l’auberge.
Maxime Daniel, pourquoi cette décision ?
« Ca fait quelques mois que j’y pensais déjà. Et le mauvais sort a aussi pesé sur cette décision. Je ne suis pas du genre « Calimero » (rires) mais je n’ai pas eu de chance cette saison sur le niveau santé. Malade en début de saison, j’ai raté quelques beaux rendez vous. Puis, alors que je retrouvais mes sensations, je me casse la gueule sur le Tour de Norvège. J’ai toujours mal depuis cette chute avec mon nerf crural qui coince. Sur le tour du Portugal après ça, je n’arrivais plus à plier ma jambe. Tu imagines que, pour rouler, c’est un peu gênant non? Après tout ça, alors que j’hésitais déjà un peu, le mauvais sort a pesé sur ma décision. Au fil des années, je sentais cette passion qui s’estompait inexorablement et avec cette blessure, je ne pouvais plus être performant pour le team. »
Avec André Greipel, on partait sur un beau train. Mais…
Pourtant au début de saison, tu paraissais vraiment motivé pour emmener André Greipel dans les sprints?
« Oui, c’est clair. J’avais la « gnac », celle que j’avais un peu perdu sur les dernières saisons justement. J’admire André Greipel et servir un grand champion comme lui était vraiment un super projet. On s’est vraiment entraîné durant l’hiver pour monter ce train. On partait sur un beau truc.
Sur le tour de Gabon, c’était les premiers réglages. Je m’entendais bien avec André. Mais ensuite, tout s’est déréglé. Le train que l’on avait monté n’a été utilisé qu’une seule fois, c’était sur le tour du Gabon, c’est tout.
Pourquoi ? Je n’en sais vraiment rien car André a tout fait pour que je le suive sur les courses. Je n’ai pas pu me rendre sur le Challenge de Majorque car mon avion avait été annulé à cause d’une grève. Du coup, le train ne s’est pas monté sur ce coup. Là, on a commencé à m’oublier un peu. André a fait le forcing pour que je le suive ensuite sur le tour d’Oman. Je m’y suis rendu et j’ai malheureusement attrapé la grippe. Je suis resté à la maison et on m’a oublié. Dans le cyclisme pro, quand tu t’absentes pour une raison ou une autre, tu es vite écarté. C’est comme ça. »
Ce train ne s’est jamais remis en place par la suite?
« Non. J’ai retrouvé une belle forme ensuite. Notamment sur le Tour de Bretagne et sur le Tour de la Communauté de Madrid mais c’était fini. Je n’ai pas été pris sur le tour de France pour emmener André. Comme je te l’ai dit, c’est comme ça. »
On vous sent un peu déçu?
« Oui peut être… Je n’en sais rien. Je n’ai pas encore assez de recul pour le savoir vraiment. Je préfère attendre avant de dire si je suis vraiment déçu ou pas. »
Quels sont tes meilleurs souvenir en tant que cycliste?
« Pffff… Il y a en pas mal. Ma victoire sur le ZLM tour sous le maillot de l’équipe de France en espoirs. Ma première victoire chez les pros pour ma première année. C’était sur le Tour du Portugal en 2013 avec Sojasun. L’année où je portais le maillot de Sojasun est ma plus belle année de coureur, mon plus beau souvenir. »
Là, c’était génial, c’était le team »Sojasun
C’est à dire?
« Mon année chez Sojasun? C’était bien plus qu’une équipe pro. C’était une famille, un vrai clan où l’on se sentait bien. Il y avait cette alchimie parfaite entre les coureurs, le staff et les supporters. C’était une « putain » de belle équipe. Je n’ai jamais retrouvé ça par la suite. Même maintenant, quand nous autres les anciens de Sojasun nous nous retrouvons sur le courses, on se parle de cette époque, on se remémore ces moments. Là, c’était génial, c’était le team »Sojasun ». Mais, hélas, le team a du fermer les rideaux sur cette saison. Et je suis parti chez AG2R La Mondiale. »
Je me souviendrai toujours de ce « Bunny hop », quand Peter Sagan saute par dessus Fabian Cancellara, à terre, qui venait de chuter
En 2016, on te retrouve sur Paris Roubaix, dans cette échappée extraordinaire
« Paris Roubaix est la course dont je rêvais. Elle me fascine par sa dureté, son exigence. C’est une course qui a ce côté « bourrin » et j’aime ça. On était partis assez tôt. Dans ce groupe, il y avait Hayman (qui allait l’emporter), Chavanel, Erviti, Bozic. Il restait encore 50 km quand on me dit d’attendre notre leader Damien Gaudin. Je décroche et je me retrouve dans ce groupe avec Fabien Cancellara et Peter Sagan. Je roulais avec eux et je me souviendrais toujours de ce « Bunny hop », quand Peter Sagan saute par dessus Fabian Cancellara, à terre, qui venait de chuter. C’était un moment unique, incroyable. Je finis 28ème à 7 min au vélodrome de Roubaix mais quel moment exceptionnel j’ai vécu. »
Désormais, vous vous lancez dans votre entreprise agricole
« Oui, je suis fils et petit fils d’agriculteurs. C’est ma passion première. Le cyclisme n’est venu qu’après et j’ai vécu ce que je voulais vivre, c’est à dire devenir pro, voir ce monde, le comprendre. J’ai fait le tour de la question et je retourne à ma terre. J’avais fait des études pour ce but. J’ai acheté mes terres et je me lance dans mon propre exploitation agricole. Mes parents ont la leur, moi la mienne. C’est une continuité en fin de compte mais j’aime vraiment ça et je savais que j’allais le faire. Je voulais juste vivre le monde pro avant de me lancer définitivment. »
Quel point commun entre vos 2 passions, la terre et le cyclisme?
» Ce sont tous les 2 des métiers de passions, ils sont durs et demandent beaucoup de sacrifices. Mais il y une différence. Quand tu es agriculteur, tu travailles dur comme les coureurs mais les résultats tu les vois de suite. Tes efforts, tu en vois le fruit sur ton exploitation. C’est vraiment bon cette récompense.
Tandis que coureur, c’est ingrat. Tu auras beau travailler comme un dératé, comme un acharné, tu ne seras pas forcement récompensé. Tu ne verrais peut être pas les fruits de ton travail. Et c’est dur moralement, c’est vraiment ingrat. »
Donc ce dernier rendez-vous avec eux me tient à coeur et les partenaires qui nous ont permis de nous retrouver durant toutes ces années
Ton dernier rendez vous cycliste?
« Sur aucune course. Je vais raccroché mon vélo car physiquement je ne suis plus à 200%. Mais un rendez vous me tient à coeur. Celui avec mon fan club, le 21 décembre prochain à Bédé (lien ici). C’est incroyable le nombre de supporters qui m’ont soutenu, ça fait chaud au coeur. Chaque année je faisais un repas pour les remercier mais c’est le minimum que je pouvais leurs offrir. Ils venaient me vois sur plein de courses. Ca a créé un vrai tissu social ce fan club, ici à Bédé. Ils m’ont vraiment fait du bien et m’ont vraiment soutenu.
Donc ce dernier rendez-vous du 21 décembre avec eux me tient à coeur et les partenaires qui nous ont permis de nous retrouver durant toutes ces années. Et je tiens à les citer car sans les sponsors, rien n’es possible. Des entreprises comme Le Crédit Agricole, Agri Ouest Fybolia, Super U Saint Méen Le Grand, La Crêpe de Brocéliande, La Ferme du Clos Badel, BreizhTIC, La Gervilloise, Ernault Daniel et Fils, Spyralis Architecture, entreprise Pocinho, David Gastineau et bien d’autres. Ce sont eux qui finançaient les déplacement des supporters, et je voulais les citer tous, je leurs tirent mon chapeau pour m’avoir permis d’avoir ce fan club à mes côtés.