Comme tout les fans de cyclisme, je me suis planté devant mon poste de télévision pour mater « Paris-Nice » la semaine dernière. Malgré une arrivée désertée par la foule, nous avons eu le droit à une belle bagarre offerte par ces guerriers que sont Soler, les frères Izaguirre, Wellens et Yates. Et quel « warrior » ce Julian Alaphilippe se donnant à fond sur chaque étape avec panache. Dans la lucarne du petit écran, on entendait les voix des fébriles commentateurs s’extasiant alors devant le « renouveau » du cyclisme Français qui se porte à merveille… selon eux. Et oui, selon les « spécialistes » de notre sport, le cyclisme tricolore ne s’est jamais aussi bien porté. Hé! Ho! Vous avez abusez sur le « pastis » local ou quoi?
Non, l’essence même du cyclisme Français, la base, ne se porte pas vraiment bien. Elle est même en train de crever. Certains organisateurs de nos belles courses et de nos managers de grands clubs amateur lui donnent à peine une dizaine d’années à vivre. Allez juste à la rencontre des ces passionnés qui sont à la base de notre sport et demandez leurs comment ils se sentent réellement. Si cette pierre tombe, c’est la pyramide qui s’effondre.
Ils se sentent à poil, vidés, rincés mais s’accrochent toujours à cette mince branche tant bien que mal. Non, Romain Bardet, Julian Alaphilippe, Arnaud Démare ou autres champions ne sont pas le reflet de la base du cyclisme tricolore. Ils sont nos champions dans des écuries privées (Cofidis, Fortunéo Samsic, etc..) ou d’état comme la FDJ. Et non le Tour de France n’est pas un indicateur de l’état de notre santé, de notre base. Le tour de France est une société privée qui ne peut se permettre d’écorcher son image sous peine de voir ses bénéfices se réduire et ne comptez pas sur elle pour causer un brin sur nos problèmes, ce n’est pas son but et encore moins sa mission. Le tour de France appartient au cyclisme mondial, il en est sa vitrine !
Les raisons de cette inquiétude en sont multiples. Nous avons rencontré tant d’organisateurs qui nous parlaient des ces charges incroyables qui étouffaient leurs budgets. Comme, pour ne citer qu’un exemple parmi tant d’autres, payer pour les contrôles anti-dopage chaque année une somme rondelette et ne voir seulement que 2 contrôles effectués en 10 ans. Ou alors payer de nouveau 5000 euros par çi, 5000 par là, aux instances pour de nouvelles règles applicables de suite. Chaque année, ces règles alourdissent le prix des charges plombent encore plus ce budget, faisant plier l’échine de ces bénévoles passionnés qui commencent à rendre leurs tabliers! Allez leurs demander le coût que facture une préfecture pour le simple fait de traverser une petite portion de route? Allez donc leurs demander ce que coûte aussi un groupe de gendarmerie pour assurer leurs sécurité?
Quand ces mêmes organisateurs demandent alors aux instances d’avoir plus de transparence sur la destination de cet argent qu’ils donnent sans cesse, leurs questions restent lettres mortes… Il faut bien payer la dette abyssale de notre fédération ! Circulez, y a rien à voir !
Comment voulez vous que ces mêmes organisateurs puissent, du coup, se permettre alors une diffusion télévision pour valoriser notre sport? Avoir la télé, c’est un budget d’environ 80 000 euros pour un direct d’une heure environ. Ils n’ont plus de « tunes » pour faire parler de leurs chefs d’oeuvre, ils sont à poil avant même donner le départ.
Et quand la télévision les diffuse, il n’y en a alors que pour nos champions français, les autres sont sûrement dopés (dixit nos spécialistes) . On se rappelle de différents commentaires affligeants sur les champions étrangers qui ne reviennent maintenant que peu souvent sur nos belles épreuves tricolores, histoire de ne plus se faire insulter, cracher dessus, ou passer pour un criminel. Pas de tête d’affiche du coup et donc moins de visuel pour la base, la spirale infernale !
Quand aux clubs formateurs, allez leurs demander le budget nécessaire pour se déplacer aux 4 coins de la France et d’avoir le droit de rouler en DN1, DN2 ou DN3, tout à un prix ! N’allez pas croire que les courses leurs remboursent leurs frais de transport! Il n’y a plus de pognon dans les caisses !
Des propositions sont lancées comme une somme infime donnée par les équipes pros à ces clubs amateurs qui les ont détectés et formés, comme cela se fait au football par exemple mais là aussi, lettre morte…
Allez ensuite leurs demander à tous, organisateurs et managers le résultat de cette image du cyclisme diffusée par certains journalistes avides de sensations cherchant frénétiquement le buzz et la gloriole en ne parlant que de dopage. Et oui, les Espagnols, les Belges, les Anglais, les Italiens sont tous des tricheurs qu’il faut dénoncer même sur des doutes infondés mais relayés massivement par le tribunal populaire qu’est la télévision.
Le résultat est sans appel. Le peloton amateur se réduit déjà comme peau de chagrin et ce n’est pas l’augmentation des licences en pass’cyclisme ni en BMX, tronquant le véritable chiffre de nos licenciés en clubs de division nationale, qui risque de le sauver. Il y a encore des jeunes champions prometteurs mais ils se font plus rare par ce terrible manque de clubs qui ont mis la clé sous la porte, endettés, par absence de ces courses fatiguées de jouer le tiroir caisse pour tout le monde, de bénévoles usés et rincés. Et si les jeunes se détournent de notre sport par manque de soutien par des clubs près de chez eux, il n’y aura plus de champions à l’avenir, la mort de notre cyclisme tricolore.
Il ne faudra pas venir demander à la nouvelle génération de prendre leurs places à ces bénévoles, ils ont vus comment leurs aînés y laissaient leurs santés !
Il ne faudra pas venir, non plus, s’étonner que Bernard Hinault risque d’être bel et bien le dernier Français a avoir remporter ce Tour de France. Il ne faudra pas venir chialer quand la pétanque et le curling seront encore plus diffusés que notre cyclisme car, pour ce dernier, l’alarme a été tirée depuis de nombreuses années. Il n’y aura plus qu’à passer le balai sur les cendres de notre sport et de nous entraîner avec ce manche pour le curling sur l’équipe 21…