14h30, je suis tranquillement assis sirotant un café bien serré (si, si à Brest, parfois, on boit de ce breuvage noir) au « mess » des officiers mariniers de la rue Yves Collet à Brest »même »! J’ai rendez-vous avec Jimmy Casper et son team « Armée de Terre » qui ont pris comme camp de base le site de la Marine Nationale. J’aperçois les véhicules qui arrivent sur le parking, les marins aux regards hagards s’étonnent de cet étrange convoi aux couleurs « cam » et affublés de vélos du même acabit. Jimmy Casper, l’ancien combattant aux multiples médailles de bravoure, saute du van, un look détonnant dans le milieu avec ces boucles d’oreilles vissées au dessus d’une mâchoire carrée surmontant un large sourire, veste « cam » sur le dos, barbe de 3 jours, il a plus la gueule d’un membre des forces spéciales que d’un jeune cadre de l’armée Française. Son binôme qu’il connaît jusqu’au moindre geste est son ami l’adjudant Chef Bengochea dont l’accent me fait réaliser qu’il vient plutôt du sud du pont de Plougastel qui domine la rade du coin.
On se siffle un énième café en regardant la carte du « Tro Bro Léon ». « Bon, on va aller reconnaître les ribinous du côté de « Guip’ » et de Kersaint » me dit-il. Je reste surpris que ce digne fils de la terre de Picardie connaisse les termes Bretons de nos courses. « Tu sais, j’ai fait 8 fois le Tro, j’adore cette course, j’aurais donné deux Grand Prix de Denain voire plus pour une victoire sur le Tro, mais je n’ai jamais eu de chance sur celle là, je le regrette sérieusement. » Il est comme ça Jimmy Casper, cash, naturel, tu sais tout de suite où il veut en venir le bonhomme, pas le genre de gars à tortiller des fesses ni à faire des courbettes, ça passe ou ça casse comme du temps où il était ce »putain » de coureur ! Pas de doute, il est d’une force spéciale pour cette équipe.
Le team prévu se rassemble avant l’heure (tradition militaire) pour aller se battre dans la campagne bretonne du Grand Patron de la Défense. Les soldats Sinner, Poulhiès, Yssaad, Alaphilippe, Bodiot, Duval, Levasseur et Thomas sont présents à l’appel. C’est l’équipe « feu » du Tro comme on dit dans la « Grande famille ». Durant le trajet, on se remémore le Tour d’Irlande avec Thomas Rostollan qui avait terminé 2ème du général en 2012, qui en avait fait baver à ces fiers coursiers irlandais comme Sam Bennnett à l’époque. On arrive sur zone, ces derniers règlent les détails sous les conseils de Jimmy et de Vincent. Je souris car je retrouve des anciennes effluves de souvenirs comme ce tutoiement au sein de l’armée quand on est au combat dans des zones hors normes telles ces terres du Finistère, tradition « mili » restée bien ancrée. Au sein du groupe, tu sens cette bonne vieille cohésion, ça se chambre comme Bryan « chocolat » Alaphilippe qui a osé une coupe quelque peu originale mais ça se soutient, ça reste ensemble. Je pousse un souffle de soulagement tant je suis heureux de sentir cette atmosphère qui n’existe que dans de très rares équipes.
C’est parti, les « boys » roulent sur ces maudits chemins de boue, la tenue se confondant au décor local, voir sans être vu sûrement, discrétion « mili » oblige ! Jimmy, au volant du van, se remémore ses souvenirs du Tro et ces ribinous qui avaient eu raison de lui à maintes reprises. Il les connait tous, il connait leurs exigences, leurs côtés traîtres et un peu « garces ». 60 km de reco suffisent pour se faire une idée de la bataille qui les attend en ce jour du Seigneur mais tous ont le sourire même Yannis Yssaad qui s’offre pourtant une double crevaison. Le Caporal Chef Sinner s’inquiète de l’état des vélos, normal il est de corvée de permanence cette semaine. Et oui ! Au sein du team Armée de Terre, les coursiers sont des soldats avec leurs tâches de corvées à réaliser à tour de rôle, le nettoyage des vélos et véhicules en font partie entre autre.
Fin de reco, on se refile le dernier « PATRACDR » (terme militaire pour connaître son rôle et sa place durant la mission) sous les yeux de l’adjudant chef. On rentre sur Brest « même » pour une douche méritée. Jimmy et Vincent allègent les corvées du capo-chef Sinner en allant laver le matériel eux mêmes, je vous l’ai déjà dit, au pays des « Biffins » on reste soudé. Au retour, un élu de la Ville de Brest nous attend pour leurs souhaiter la bienvenue dans la cité du mataf. Marc Berthelot un féru de la p’tite reine voulait rencontrer cette section de l’Armée de Terre et leur souhaiter bonne chance sur la terre du Léon. Ça donne du baume au cœur à ces « boys »mais ils pensent déjà à leur mission et, dans leurs cerveaux cet adage des diables rouges qui résonne encore; « Qui ose gagne »!