34 ans au compteur, 20 ans dans le cyclisme dont 13 dans le team du Grand trèfle. Non, pas celui des ces celtiques cousins d’Irlandais mais celui du tricolore Français de la FDJ. Benoît Vaugrenard y tient lui aussi à cette feuille qui selon la légende, porte chance. le Celtique est natif de Vannes, de cette terre du Morbihan, de celle d’Isabelle Stuart d’Ecosse, pays de granit et d’un célèbre champ de Menhirs résistants aux temps envers et contre tout, dressés fièrement en défiant le ciel comme les poings tendus de ces coureurs victorieux. C’est de ce sang qui coule dans les veines de ce guerrier comme le prouve ces années dans le team de Marc Madiot, le double vainqueur de la bataille des seigneurs que l’on surnomme Paris Roubaix. Le genre de compagnon d’armes qui ne vous lâche jamais. 9 grands tours (6 tours de France, 2 Vuelta, 1 Giro) et jamais un abandon, il a toujours été là auprès des siens, semper fidelis !
Ses débuts dans l’arène du sport, il les fait chaussé de crampons de footballeur dans le club de Péaule. Heureusement pour la Bretagne, à 14 ans il veut suivre son frangin sur son vélo et prend une licence au Véloce Vannetais. Avec eux, il remporte la Route de l’avenir 2000 tout en claquant tout de même 2 étapes. Ce fut ensuite la mythique équipe Jean Floc’h, le Graal en 2000. En 2003, le Baron de Mayenne le remarque et le recrute dans son armée. Le Breton lui rendit les honneurs en remportant le titre de champion de France du contre la montre en 2007. Jusqu’en 2011, il a brandit fièrement l’étendard du Trèfle sur différents continents, sur plusieurs combats et en remporta quelques uns comme le Tour du Poitou Charentes 2008, Isbergues en 2009, 8ème sur les terres Belges de la doyenne Liège Bastogne Liège, étape sur le Tour d’Alguarve et de Dunkerque en 2010 entre autres, inscrites pour l’éternité sur la table des victoires.
Mais son trèfle perd de sa magie les 2 années suivantes, cette « putain de poisse » qui vous colle a la peau C’est d’abord une mononucléose puis ensuite, mauvais coup du sort, une blessure l’impose de mettre un genou à terre. Mais qu’importe, il sait qu’il reviendra, qu’il se relèvera. Ce sera chose faite en 2013, qui plus est sur sa classique tant aimée qu’est Liège Bastogne Liège. Il y termina en 11ème.
Mais le Dieu de l’Olympe du cyclisme veut sûrement tester la foi de ce guerrier une fois de plus. Il lui inflige un nouveau fléau, un mal difficile à détecter, celui qui vous coupe le souffle par manque d’oxygène. Le verdict tombe coupe un couperet: une artère iliaque obturée. Là, il se relève de nouveau et avec encore plus de rage et de détermination. Il reprend la route du tour de France en 2015 et se bat comme un damné pour emmener son leader Thibaut Pinot.
Revenu d’Australie, cette terre rouge où il batailla avec les guerriers Aussies, il repart plus combatif que jamais en attendant de retrouver sa doyenne Belge, tel ce chant Gortoz Ar Ran de son pays celtique, pour sa 13 ème année dans l’Olympe des Word Tours. 13, ça porte bonheur avec un trèfle à vos côtés!
Le Tour DownUnder
Vous revenez du Tour DownUnder, qu’avez vous retenu du public Australien ?
Benoît Vaugrenard; « Le Tour DownUnder est une des seules courses qu’ils ont en Australie et c’est la seule course du ProTour. Pour eux, c’est un peu l’équivalent du Tour de France chez nous, une grande fête durant l’été. Ils sont très enthousiastes de voir les coureurs Européens, les professionnels, les équipes du World Tour… D’habitude, ils regardent le Tour de France la nuit chez eux, alors de voir les coureurs dans leur pays, ça les rend vraiment heureux, c’est une grande manifestation. »
Le souvenir que vous gardez de ce Tour ?
B.V: « L’Australie c’est très loin, entre les 24 heures de vol et le décalage horaire, il a fallut s’adapter et c’est ça qui a été difficile. J’en garde un très bon souvenir entre la course et ce qu’il se passait à côté. C’est dépaysant de se retrouver là-bas sous 38°au mois de janvier. Ça change un petit peu, même si cet hiver n’a pas été très froid en France ça fait toujours plaisir de remettre le cuissard court si tôt dans l’année ! »
Votre saison à venir.
Vous avez participé au stage de cohésion de la FDJ.fr, comment s’est-il passé ?
B.V: « Oui, on a fait un premier stage de cohésion au mois de novembre puis un autre avant les vacances de Noël à Calpe et également là en janvier pendant qu’on était en Australie. Le stage de novembre était sans vélo, on a dormi dans un refuge, fait des randonnées en montagne, pleins d’activités comme ça, ça change un peu et c’était pour la cohésion du groupe. En décembre c’était vraiment axé sur le vélo avec beaucoup d’entraînements, un vrai stage traditionnel «
Comment vous-sentez vous en ce début de saison ?
B.V: « Sur le Tour DownUnder ça allait physiquement même si je n’avais pas de grandes sensations, entre le décalage horaire et la chaleur ça a été un peu difficile pour moi mais j’étais là en équipier pour Steve Morabito, on avait pour objectif de terminer dans les 10 premiers du classement général : contrat rempli. Les sensations étaient moyennes assez malgré un bon entraînement tout au long de l’hiver, mais je sais qu’en Europe tout devrait rentrer dans l’ordre. »
Comment abordez-vous cette saison ?
B.V: « Là je récupère un peu de l’Australie.Mine de rien avec le décalage, on met toujours un peu de temps à récupérer. Là, à partir du 9 février je pars en Italie notamment pour le trophée Laigueglia le 14 février, après je devrais monter crescendo avec le tour du Haut-Var. Les deux plus gros objectifs pour moi en ce début de saison sont clairement Paris-Nice ou le Tirreno Adriatico même si je pense plus partir pour l’Italie, une course d’une semaine du WorldTour, on va tâcher de bien s’y préparer.
Il y a deux leaders à la FDJ.fr, Démare en sprinteur, Pinot en grimpeur, quel rôle jouez-vous ?
B.V: « Je suis là pour les épauler au maximum quand c’est dur pour eux, dans les moments difficiles que ce soit physiquement ou moralement, lorsqu’ils sont un peu dans le doute. Après c’est surtout les mettre dans les meilleures conditions dans un final de course que ce soit dans les sprints pour Démare ou aux pieds des cols pour Pinot. Mais mon rôle est aussi de leur apporter mon expérience, Arnaud et Thibaut sont encore de jeunes coureurs. »
Sur des tours comme le Tour de France, la FDJ.FR a gagné quelques étapes, pensez-vous qu’elle peut réellement concurrencer les grosses écuries comme la Sky ou BMC ?
B.V: « Collectivement l’équipe en elle-même non, on a pas l’effectif qu’ont ces équipes. Nous avons 10 à 11 millions d’euros de budget alors que ces équipes là en ont 30, la différence elle est là, c’est comme comparé le FC Barcelone et l’Olympique de Marseille au foot. Ces équipes là peuvent se payer les meilleurs coureurs, quand tu vois le Tour de France et l’équipe de Froome, tu prends les 9 coureurs de la Sky, ils terminent tous dans les 10 premiers au classement général mais leur rôle est d’être équipier avant tout ça montre bien que c’est vraiment difficile de les concurrencer. Pour moi c’est tout simplement une histoire de budget, forcément quand tu as un gros budget tu récupères les meilleurs coureurs. Après Thibaut Pinot lui peut les concurrencer, mais collectivement nous l’équipe on ne peut clairement pas rivaliser avec ces grosses équipes, ça c’est impossible.
Concernant les classiques de Printemps, Démare sera considéré comme leader, mais derrière il y a t-il des coureurs capable de jouer leur carte comme vous, Yoann Offredo ou Le Bon entre autre, quels rôles aurez vous sur ce type de course ?
B.V: « C’est sur que Démare sera protéger, après sur des courses de ce type là il peut y avoir beaucoup d’incidents comme des crevaisons, des chutes… Des coureurs comme Offredo ou Le Bon peuvent également avoir un rôle de leader aussi, maintenant c’est à eux de saisir leur chance. »
L’évolution du cyclisme.
Que pensez-vous de l’évolution du cyclisme français ?
B.V: « Ça a réellement changé sur plein de domaines. A mes débuts il y avait des entraîneurs au sein de l’équipe mais on s’entraînait un peu à l’ancienne, on avait pas tout ce qu’on avait maintenant. Aujourd’hui il y a beaucoup d’avancées sur ce plan là, que ce soit au niveau diététique, du matériel ou des entraînements… Plein de petites choses qui ont fait évoluer le cyclisme. Quand je suis passé pro la FDJ, c’était plutôt une équipe « familiale », on s’entraînait, on faisait les courses et on courait beaucoup mais aujourd’hui une équipe c’est carrément une entreprise. Quand je suis passé pro en 2003 je me débrouillais seul, aujourd’hui un jeune qui passe pro a tout pour réussir : du monde autour de lui, des capteurs de puissance et autres moyens technologiques, des entraîneurs… Il a vraiment tout pour réussir ce qui n’était pas spécialement le cas à mon époque. »
Pensez-vous que la France a encore un rôle à jouer face à cette « mondialisation du cyclisme » ?
B.V: « Oui je le pense. Le cyclisme mondial a énormément évolué, à l’époque de Bernard Hinault il n’y avait pas toutes ces nationalités qu’il y a maintenant. On a jamais eu autant de bons coureurs depuis un ou deux ans que ce soit Pinot, Bouhanni, Démare, Bardet, Coquard… Il y a eu un creux avant eux, un gros creux, une époque où il y avait Chavanel ou Voeckler mais pas grand chose d’autre. Les années 1990 ont amené un bon cru, ce sont d’excellents coureurs même Alaphilippe ou Gallopin, tous ces coureurs là peuvent s’exprimer dans chaque domaine. Par exemple aux Jeux Olympiques à Rio l’équipe de France aura une très belle carte à jouer. La France ne peut envoyer que quatre coureurs mais une équipe constituée de Bardet, Pinot, Gallopin et Alaphilippe ça tient plus que la route ! Le Test Event a bien montré qu’ils sont capables de jouer le podium et avoir de réelles ambitions ce qui n’était pas le cas à une certaine époque. »
Votre carrière.
La fin de votre carrière approche, vers quoi comptez-vous axer votre reconversion ? Dans le milieu du cyclisme ?
B.V: « J’y pense forcément mais je n’y ai pas trop réfléchi et je ne sais pas trop. Rester dans le vélo et devenir directeur sportif ou s’occuper des jeunes sont des projets qui me plaisent bien. Ma carrière n’est pas encore terminée, je ne sais pas encore quand je vais arrêter je vais peut-être continuer encore un an ou deux. Maintenant la reconversion dans quoi, où et quand je ne sais pas, j’ai quelques idées mais c’est encore un peu vague. »
Votre plus beau souvenir dans le cyclisme ?
B.V: » J’en ai trois en tête : Mon premier Tour de France en 2006, la première fois que tu rentres sur les Champs-Élysées ça fait quelque chose, il y a aussi eu le titre de champion de France contre-la-montre en 2007 et le contre-la-montre par équipes Vannes-Plumelec sur le Tour de France l’année dernière qui était vraiment énorme. »
Votre pire souvenir ?
B.V: « 2011. J’étais dans mes meilleurs années et j’ai attrapé une mononucléose qui m’a fichu ma saison en l’air. C’était une mauvaise année et un très mauvais souvenir. »
Cette passion du vélo que vous avez, n’a t-elle jamais été émoussée ?
B.V: « Non, il y a eu des découragements mais de là à arrêter non. Je ne me suis jamais dit : « J’arrête j’en ai marre ! » J’ai toujours gardé espoir en me disant que la roue va tourner, même si c’est long ça commence à aller dans le bon sens, je ne regarde pas derrière mais devant. »
Par Camille Le Saux