44 ans au compteur dont 17 ans comme coureur pro au sein des plus grands teams mondiaux, le guerrier Germanique Jens Voigt a tiré sa révérence cette année, enlevé son armure aux armoiries du clan « Trek Factory Racing », lui et sa monture se sont définitivement éloignés des champs de batailles aux 4 coins du globe. Sûrement au plus grand bonheur de ses adversaires tant il pouvait se montrer redoutable et sans pitié dans les plus rudes combats. Le maître du temps à décidé de prendre son temps maintenant.
Avec sa gueule de « beau gosse », taillé à grand coups de serpe, des yeux clairs et perçants dévoilant un caractère bien trempé, il est aussi muni d’un esprit donnant plus de valeur au mot « Fidélité » qu’à n’importe quelles de ses victoires, comme il le prouva à Bobby Julich en 2005. Le guerrier a levé bien haut le bras après avoir serré les dents sur les plus grandes courses et étapes du Tour de France, du Giro, glaner tout de même 5 critériums international et pour couronner le tout, il s’est offert le record de l’heure en 2014 à 43 ans, gravant à jamais le mot « Respect » en haut de son élogieux palmarès.
Bref le « gladiateur » a bien mérité son « gludius » (glaive de liberté). Non, on ne le verra plus serré les dents et en faire baver quelques monstres de l’asphalte sur les lacets pentus des plus grands cols. Non on ne verra plus son grand sourire éclatant sur les lignes d’arrivées alors que tous maudissaient encore ces « putains » des derniers kilomètres, et lui toujours avec cette devise en tête « Shut up legs » qui, dans un Français correct, se traduit par » Taisez vous les jambes ». 17 ans de carrière des moments de gloires et de bonheurs avec parfois des sales coups de blues, d’amertumes mais il était toujours là, tel un capitaine emmenant le peloton, le mors aux dents, écrémant ce dernier jusqu’à placer ses leaders sur les plus hautes marches des podiums. Oh non! Il n’était pas un simple « grégario », il est le capitaine Jens Voigt et restera à tout jamais un grand champion qui nous a tant fait rêver quand on voyait pointer le bout de son casque à l’avant. Désormais, il attaque une seconde carrière, celle d’Ambassadeur de la marque Trek, à ce team à qui il a tant donné et qu’il lui a tant offert, la star « Trek » continue son odyssée!
L’occasion pour Be Celt nous fut donné de le rencontrer, au magasin Trek bicycle de Quimper avec Julien Bernard et Jérémy Bescond, tenu par un autre gladiateur, Arnaud Le Goff que l’on surnomme « Spartacus » dans le pays Celtique. Comme tout grand Seigneur qu’est Jens Voigt, en homme simple et sans vanité, il a bien voulu répondre à nos questions.
Be Celt: « Jens Voigt, vous avez pris votre retraite de coureur pro, quelle est votre nouvelle vie désormais ? «
Jens Voigt: » Ouf! 17 ans comme pro et maintenant effectivement une nouvelle vie mais toujours dans le cyclisme. Je reste avec Trek comme Ambassadeur de la marque comme aujourd’hui sur Quimper avec l’ouverture du magasin d’Arnaud. Je teste aussi les prototypes de Trek et je donne mon avis comme sur les positions. Je travaille aussi pour Trek Travel qui est aussi une compagnie de voyages touristique avec des stages de vélos pour tous. Bref, beaucoup de boulot car de mon côté aussi je finis d’écrire mon livre qui sera publié en Anglais et en Allemand. J’espère qu’il sortira en Français car j’y ai vécu de belles années en tant que coureur aussi avec GAN et Crédit agricole. Et je fais toujours ma ligne de tee-shirts » Shut up legs » donc bien occupé. »
Une reconversion préparée de longue date ?
Jens Voigt: « J’avais préparé ma reconversion depuis longtemps bien sûr. C’est un sacré changement. Quand tu es coureur, tu es toujours assisté et on est aux petits soins avec toi. Une fois en retraite c’est une autre histoire, c’est une nouvelle vie effectivement avec un nouveau challenge. Tant que tu es pro, tu as plein d’amis qui te disent: « Jens, quand tu arrêtes, tu m’appelles et on verra ce que l’on peut faire ensemble ». J’ai arrêté, j’ai appelé et très peu d' »amis » m’ont répondu en fin de compte (rires). Tes amis se comptent sur les doigts d’une main quand tu raccroches. Mais heureusement, Trek m’a toujours soutenu et je suis vraiment heureux d’être avec eux et de vivre cette nouvelle aventure. »
Que gardez vous comme meilleurs souvenirs de votre carrière ?
Jens Voigt: « Il y en a plein comme ma dernière victoire pro sur le tour de Californie, tant de bons souvenirs me reste gravé à jamais. Pas forcément des victoires, mais aussi des moment forts. Un moment vraiment sympa c’est quand j’ai fait la bise à Madame Chirac. C’était à Castel Sarrasin où je remporte la 16ème étape du tour de France 2001. Elle était de là bas et donc elle est venue me rencontrer.
Mais le moment le plus fort pour moi, c’est la victoire de mon ami Bobby Julich sur le Paris Nice 2005. Dans la dernière étape, on n’était plus que 2 coureurs de la CSC dans un groupe où tous voulaient le maillot de leader de Bobby, surtout Valverde, Contador et Rebellin. Là, on s’est battu avec le couteau entre les dents. Je suis passé devant à 30 km de l’arrivée et j’ai appuyé sur les pédales, cherchant les autres un par un et protégeant Bobby. Je savais que sa femme et sa fille étaient là haut, sur la ligne d’arrivée et il n’était pas question de laisser filer son maillot. Je me devais de me sacrifier pour lui, pour cette victoire. Ce jour là, tu avais gagné ta journée et donner un sens à tout ça, voir le visage de ton pote éclairé par ce maillot jaune, ca n’a pas de prix ! »
Les amis et la famille sont des valeurs chères à votre cœur. Parmi vos enfants, il y en a t-il un qui a pris la relève sur le vélo?
Jens Voigt: « Oui, c’est primordial cet équilibre familial. Je suis très proches de mes enfants. Moi et ma femme Stéphanie, on est toujours à leurs écoutes. Quand j’étais coureur, à l’inter saison, je n’ai jamais été dans les camps d’entraînement, je restais chez moi à Berlin pour m’entraîner et rester plus de temps avec ma famille. J’ai 6 enfants avec Marc l’ainé qui a 20 ans, Julian 16, Adriana 12, Kim Helena 10, Maya 8 et Helen 4 et demi. C’est une belle famille ! Le vélo, je ne les ai jamais poussé à en faire. Les aînés ont essayé mais c’est dur de se lever à 6h du matin le dimanche quand tu es adolescent (rires). »
Et vous reverra t-on dans le peloton un jour, comme cadre peut-être?
Jens Voigt: » Ce n’est pas impossible effectivement. Pour l’instant, j’aime vraiment ce rôle d’ambassadeur et de conseiller pour Trek, je me sens bien chez eux. C’est vraiment un bon job, et cela me donne du temps aussi pour mon livre et ma marque de vêtements « Shut up Legs » mais peut être que 3 ou 4 ans, je me verrais bien comme DS au sein du team Trek, qui sait ? »
Liens: www.trekbikes.com
Tee shirts (By Jens Voigt) : shop.shutuplegs.com