Photo Be Celt et Sean Rowe
La nuit est tombée depuis longtemps. Allongé sur mon « paddock », je lis comme le passionné que je suis les exploits des champions sur ma tablette numérique en guise du bon vieux bouquin. Et oui, même les vieux cons dont je fais partie se sont mis dans la « generation 2.0 ». La voix du « Boss » Springsteen me berce tout doucement vers les bras de Morphée ou plutôt vers ceux de ma « sweetheart ». Damn it ! Elle a mis ses boules Quies et elle est déjà partie rejoindre le royaume des rêves où ch’uis sûrement pas Brad Pitt chevauchant son fougueux vélo blanc. Il faut avouer que le vélo, c’est pas trop son truc ! Alors, m’entendre parler de tel guerrier ou de telle bataille, elle n’en a que faire. Elle préfère me laisser replonger dans mon enfance après s’être endormie !
Faut dire aussi que je suis toujours resté ce « kid »au fond de moi, celui qui se faisait ses premiers tours de roues dans la rue du quartier de Fariimata sur ma petite île de Tahiti ou sur celles de ma verte Erin. Je crois que je n’ai jamais grandi de ce côté-là ! Et tant mieux en fin de compte. Tout homme garde en lui cette part d’enfant pour vivre ses rêves, sinon on finirait sûrement tels des vieux cons aigris voire pire, on pourrait même écrire des saloperies bien dégueulasses telle une « Tatie Danielle » sur un sport qui nous aura sûrement frustré à un certain moment !
Car c’est ça le bike, c’est un rêve de gosse avant tout ! Qui ne s’est jamais pris pour Hinault ou Kelly dans sa bande de gamins de quartier ? Rappelez-vous, on se tirait tous la bourre sur cette légère montée, l’Alpe d’Huez de notre rue, on levait même les bras comme nos idoles en évitant soigneusement de se péter les dents contre le mur de la voisine ! On rêvait comme nos « kids » le font maintenant devant un écran en jouant à « Pro Cycling Manager » en version originale. Comme dirait le « Boss », on avait ce feu en nous ! Je me souviens le dimanche, sapés comme des princes du bitume avec nos jerseys en coton, la visière de la casquette repliée, on accompagnait le paternel à la course du village. Ça sentait bon la frite, la bière et la fumée des saucisses parfumait la ligne d’arrivée. C’était des rires à grands coups d’amitiés qui résonnaient dans les rues de notre village . C’était notre messe, le bal pouvait commencer ! Au mois de juillet, avec la Renault 16 équipée version moumoute sur le siège arrière, c’était le tour de France! Comme des millions d’autres, on attendait que le peloton nous joue son « setlist ». Certain de ces artistes bikers nous offrait même des solos qui nous envoyaient à milles lieux de cette foutue planète. On oubliait les soucis de l’année. On était heureux. C’était les vacances, nos idoles du rock nous faisaient danser, nos champions nous faisaient rêver et leurs exploits légendaires nous marquaient à jamais !
Bref, on a vieilli. Certains mieux que d’autres faut croire. Et notre Rock’nd Bike en a pris une foutue beigne ! Maintenant, quand je vais faire un tour sur ces courses régionales qui disparaissent au fil des ans, des cheveux blancs parsèment de parts et d’autres les routes de mes rêves de gosses. « Sont passés où les jeunes? Nos courses? Que s’est il passé ? Alors qu’en Irlande, au Royaume-Uni, en Australie et dans tant d’autres pays, le « Bike » est devenu un style de vie, un look et une attitude, en France il est en train de se prendre une sacrée branlée. Comme dirait le « Boss » dans « Glory Days »: Où sont passés nos jours heureux ?
La faute à pas de bol ou à l’appât du gain et de la gloire coûte que coûte, de ceux qui déglinguent notre vélo aussi faisant fuir nos sponsors par la même occasion. Et oui, Lance Armstrong a bien démoli ces rêves de gosses comme certains autres champions peu scrupuleux, c’est clair ! Là-dessus, on ne peut le nier! Tel les « bands » pour midinettes » Mili Vanili » ou autre « One Direction », ils nous avait blousés avec leurs beaux discours mielleux, préfabriqués au nom du fric et de la gloire éphémère. Quand de vrais journalistes, anciens coureurs, connaissant parfaitement la musique avaient réussi avec des preuves et un réel travail d’investigation à les virer de notre monde, d’autres se sont vu l’occasion de se la jouer façon « You can be hero, just for one day! » pour en faire leur businness. Histoire surtout de se faire connaître, de caresser eux aussi la gloriole, de vivre leurs rêves de pseudos journalistes ». Mais avant de brûler son auréole, encore faut-il respecter l’être humain et son rêve de gosse ! Chaque histoire peut-être est une salope que l’on traite comme bon nous semble. Quand certains voient de dantesques morceaux en solo joués sur les routes d’un tour, ou des équipes jouant de concert tels des « bands » devant des millions de personnes, d’autres voient des tricheurs, des rockers jouant en playback, avec des moteurs et de l’électronique de partout en ignorant parfois les lois de la physique et de la force centrifuge, tout ça sans preuves mais avec 2 sec d’image (Quoique, peut-être dormaient-ils près du radiateur quand ils étaient enfants ?) Qu’importe les preuves ! Ils font le buzz, ce Graal si recherché, jetant le cyclisme dans une psychose. Bref, ils n’hésitent pas à flinguer tous les coureurs sans exception et surtout ceux qui osent. Ils pulvérisent en quelques mots les rêves de gosses, celui des nôtres par la même occasion, au nom de cette putain de gloire éphémère, quitte a vendre leurs âmes tel Armstrong sur l’autel du cyclisme.
Le mien n’était pas vraiment un adepte du « Bike ». Pas assez fun, pas assez rock à ses yeux d’enfant, faut dire aussi qu’il en avait assez entendu! Le poster de Ronaldo trône dans son royaume. Mais soudain, voilà qu’un Slovaque débarque avec ses pirouettes, sa longue chevelure à la James Hetfield de Metallica et se met à jouer parfaitement des putains d’accords sur son Bike. Un nouveau riff balayait tout sur son passage. Par la meilleure des réponses, il gagne loin de toute polémique à deux balles, il le dit lui même: « il nous faut révolutionner le cyclisme ! » Il est notre nouvel Elvis, notre nouveau « Boss ». Il en joue même dans ses clips, il s’adresse et va à la rencontre de son public tandis que d’autres se la jouent » crooner isolé ». Exubérant ? Fantasque ? Rebelle ? Oui il est tout ça mais il gagne sur tout, sur tous, de nos coeurs à nos espoirs, réveillant notre âme de gamin comme celui du mien qui veut se mettre dorénavant à jouer de cet instrument que l’on appelle « Bike ». Les sponsors s’arrachent le Slovaque, il est jeune, il est des leurs. Et qu’importe les commères aigries, Peter Sagan redonne un coup de jeune à ce cyclisme rendu totalement anesthésié aussi par les coups de plumes de certains! Sans lui il faut bien l’avouer, on se ferait bien chier par moment ! Depuis d’autres ont rejoint ce « move » rock’nd Bike, décomplexant d’autres bikers de cette peur de la gagne. Il est celui qui donne à nos kids l’envie d’être « Born to Run », comme nous l’avions nous aussi attrapé ce virus à leur âge.
De la même façon que Merckx, Anquetil, Hinault, Coppi ou encore Bobet ont libéré nos corps le dimanche, Sagan et d’autres ont déliés nos esprits Rock’nd Bike! Et vous savez pourquoi ? Pourquoi y a t-il encore un public pour ces putains de batailles après toutes ces saloperies ? Parce que le monde n’a pas changé, il veut toujours rêver. Notre cyclisme en est devenu malade de cette psychose et nos courses agonisent mais au fond du cet état comateux, le coeur du bike bat toujours. Et de cette nuit où j’avais besoin de me sentir jeune en me remémorant d’épiques batailles, au son de ces putains de riffs , il m’a fait me sentir comme si c’était la première fois que j’entendais du rock ! Je ne suis pas un journaliste, je n’ai pas cette prétention, je ne suis qu’un passionné au beau milieu de la nuit, allongé sur son paddock qui lit les exploits de ces champions. Laissez nous rêver comme ces passionnés et gamins dont je suis et croire en notre futur et en celui du sport de nos kids que l’on emmènera de nouveau sur nos courses de village, laissez les rêver. « Thougher than the rest » comme dirait le « Boss », je ferme mes yeux et je me dis « Bike is not dead » !
Un passionné