21h à peine, la lune est là, au dessus de ma tête. Et tel un vieux loup solitaire, je prends ma gratte, un « sky » et m’en vais sur ma terrasse face à l’océan. Je m’en vais jouer un p’tit morceau du grand BB King, Enfin tenter deux ou trois accords qui t’envois à mille lieues de cette drôle de planète. Histoire de pleurer tel un vieux con nostalgique sur une jeunesse qui a tout connu dans les années 70-80. Le rock avec ces riffs qui vous mettaient à genou dès les premiers accords. On pouvait même fumer dans les trains, les avions et on n’avait pas encore ce putain d’internet qui nous apporte, tels des larves vautrées sur leurs canapés, les dernières informations minute par minute. Rien ne nous était interdit. On avait nos rebelles, on avait nos battants, nos icônes! Et il y avait nos champions comme Hinault, Moser, Lemond, Fignon, Kelly, Van Deraerden, Maertens, ce genre de mec qu’il fallait pas trop gonfler sous peine d’en prendre une bonne à s’en souvenir le soir dans nos pubs! Ce genre de mec qui te donnait foi en l’avenir.
Alors, tel un vieux con grisonnant, me voilà chialant avec ma gratte sous les étoiles à jouer ces songs sorties d’un autre temps, celui de la liberté, celui où tout était permis ! La preuve en est me dis-je: on a toujours les Rolling Stones avec leurs 70 printemps bien tapés qui écoulent toujours leurs doux shoots musicaux à grands coups de stincky fingers. Le Boss Springsteen remplit encore des stades de 100 000 milles personne et Iggy Pop nous crache toujours à la gueule. Même dans le cyclisme, on est fan de ces années là, on les nomme même les « Vintage » tant on est à la recherche du temps passé, tel un blues de BB King avec « The Trill is gone ». Le King du blues le dit: « Baby, le frisson est parti, le frisson est parti ailleurs!
Mais je n’avais pas compris vraiment le sens du mot Blues! Ce mot qui vent du Blues devils, de ces idées noires, les miennes et celles de personne d’autre, celles de mon temps passé! Et ce sont ces gamins d’à peine 13 ans qui me le rappelle! Sans rien dire, les voilà qu’ils prennent la gratte et qu’ils me jouent ces accords à la perfection avec ce mouvement de tête mélancolique, ce regard arrogant me lançant: « Nous aussi, on capte, nous aussi on peut se rebeller, nous aussi on sait jouer ces accords encore mieux que toi! » Un grand coup de pied au cul ! Ils ont raison !
En tout cas en ce qui concerne le sport (Pour le rock, on a encore Kenji Girac qui distille sa soap, c’est pas gagné!). Dès lors, je me souviens de Romain Bardet attaquant dans le dernier col, en risquant sa place dans le top 5 sur le tour de France, je me souviens aussi de Julian Alaphippe s’en allant jouer son récital en solo dans la plaine ou la montage du tour, faisant vibrer les foules à grands coups de riffs avec ses braquets, comme il le fit sur les plus belles scènes Flandriennes et Wallonnes. Je me souviens de ça. Vous avez raison les kids, vous êtes là mais nous ne vous voyons pas. Et avec vous, toute une génération tel Rémi Cavagna, Valentin Madouas ou David Gaudu qui nous ont déjà montré ce qu’ils étaient capables de faire sur les plus belles scènes!
Ils ont raison ces mômes, ils sont l’avenir. Arrêtons de flinguer cette jeunesse tout aussi rebelle et enthousiaste que la nôtre. Arrêtons de jouer à ces vieux cons aigris en les critiquant sans cesse, en doutant de leurs capacités à faire exploser les records comme vous nos idoles, le firent à notre époque. Arrêtons des les suspecter sur chaque course derrière nos micros tels des revanchards de ce temps qui passe, en les jetant en pâture à un public désorienté par de tels doutes lancés par des anciens qui eux aussi ont aussi révolutionné le vélo à papa, et qui eux aussi ont reçu leurs lots d’emmerdes et de doutes! Laissons-les tranquilles et laissons les croire en l’avenir comme nous l’avions fait à notre époque. Donnons leurs plutôt un abri avec nos rêves et notre foi en eux, comme dirait les Rolling Stone » Gimme Shelter » ! Mêmes les papys du Rock le réclamaient à l’époque de Mai 68, cette révolution lancée par les jeunes !
Soudain, je me mets à croire aux résolutions débiles de ce « fucking » nouvel an! Le genre de connerie qu’on lance juste pendant un mois pour se donner bonne conscience en ce début d’année! Et celle de l’année 2017 sera celle ci et elle est loin d’être une connerie, elle vient des kids: » Jeunesse, bottez nous le cul! Affolez les chronos, déjouez les pronos. Faites nous fermer nos gueules de vieux cons une fois pour toute. Donnez nous une putain d’année à grands coups de passion! » Dans le rock, c’est plutôt mal barré, quoique! Mais dans notre cyclisme, ces gars là sont capables de nous jouer un « Rock me baby! » qui nous fera de nouveau prendre nos grattes, histoire de louer ces moments d’histoire face à l’océan, sous un riff de song blues !